Sujet :

Corps, émotion et sentiment par A. Damasio

Thoth
   Posté le 26-01-2009 ŕ 04:14:56   

Voilà ce qu'on trouve sur Antonio Damasio en consultant Wikipédia :

Antonio R. Damasio (Lisbonne, Portugal, 1944) est professeur de neurologie, neurosciences et psychologie. Il est le directeur de l'Institut pour l'étude neurologique de l'émotion et de la créativité de l'Université de la Californie méridionale (University of Southern California) depuis 2005, après avoir été le directeur du département de neurologie de l’Université de l'Iowa pendant 18 ans. Il est également professeur adjoint au Salk Institute d'études de La Jolla et écrivain.

Neuroscientifique de renom, ses travaux portent sur l'étude des bases neuronales de la cognition et du comportement. Parmi ses principales découvertes, on notera :

* la mise en évidence des activations des trajets corticaux et sous-corticaux dans la reconnaissance des visages et des objets;
* l'identification de sites neuronaux impliqués dans le processus des émotions;
* la démonstration que les émotions sont impliquées dans la prise de décision;
* l'identification de régions limbiques et du tronc cérébral suspectées jouer un rôle dans la maladie d'Alzheimer.

Il a participé aux conférences du Mind and Life Institute, qui a pour but de promouvoir un dialogue entre la science et le bouddhisme."

>>>>>>> J'ai lu tous les livres de ce chercheur inspiré et philosophe, et voici ce que je trouve sur le net en faisant une petite recherche :

"Antonio Damasio : « L'esprit est modelé par le corps »

Quand vous admirez La Joconde ou écoutez l'une de vos oeuvres musicales préférées, ce n'est pas seulement votre cerveau qui est mobilisé, c'est votre corps. Émotions et sentiments, même les plus complexes, reflètent une dynamique que l'on commence seulement à explorer. Elle implique des cartes neurales qui traduisent l'activité du corps, dans toutes ses dimensions.

LA RECHERCHE : Vous dites que la paramécie, avec son unique cellule, a des émotions. N'est-ce pas aller un peu loin dans l'emploi de ce mot ? ANTONIO DAMASIO : Avec ses cils vibratiles, la paramécie perçoit immédiatement un environnement favorable ou défavorable, s'écarte vivement d'un contact que son unique cellule perçoit comme dangereux ou agressif, se rapproche de bactéries appétissantes. Ce faisant, elle exprime quelque chose comme le désir inconscient de rester en vie, de préserver l'équilibre du profil chimique de ce que Claude Bernard appelait le milieu interne. Bien que la paramécie soit dépourvue de tout système nerveux, son comportement manifeste déjà l'essence du processus émotionnel, il préfigure le monde de nos émotions. Cela ne signifie pas pour autant qu'elle ressente ces émotions. Elle n'en a pas le sentiment. Diriez-vous que la mouche, qui a un cerveau, a le sentiment de ses émotions ? ANTONIO DAMASIO : Probablement pas. Une mouche en colère a l'émotion de la colère, elle n'en a sans doute pas le sentiment. Il y a un hiatus entre l'ensemble de réponses réflexes bien orchestrées que constitue une émotion et le fait de former des représentations cérébrales au sujet de cette émotion. Pour que le sentiment d'une émotion se crée, il faut un cerveau plus compliqué. Celui d'un chien ou d'un chat, par exemple."

Source : http://www.larecherche.fr/content/recherche/article?id=4528

>>>>>>> Ce qu'expose Antonio Damasio dans cette interview, va exactement dans le sens de ce que je vous explique à propos des émotions et des sentiments. Ce qui finalement n'est pas très étonnant puisque je me base en partie sur les découvertes de ce grand monsieur pour me faire comprendre. Un scientifique digne de ce nom qui non content d'avoir un cerveau bien rempli et bien structuré, prouve qu'il possède aussi un coeur généreux et une âme inspirée.
Atil
   Posté le 26-01-2009 ŕ 11:51:34   

"Une mouche en colère a l'émotion de la colère, elle n'en a sans doute pas le sentiment."

>>>>>>>On ne peut donc pas appeler ça de la colère.
De même si un objet frole mon oeil, alors je ferme aussitôt celui-ci. Pourtant je n'ai pas ressenti de peur.
Ce n'est donc pas de la peur. C'est une réaction instinctive, automatique comme la porte du supermarché qui s'ouvre toute seule à mon approche.
Il y a tout un continuum entre les instincts et les émotions. Quand une réaction se fait en impliquant la conscience, on appelle ça "émotion", quand elle se fait sans l'implication de la conscience, on appelle ça "instinct".
Thoth
   Posté le 26-01-2009 ŕ 19:48:26   

Atil a écrit : "De même si un objet frole mon oeil, alors je ferme aussitôt celui-ci. Pourtant je n'ai pas ressenti de peur.
Ce n'est donc pas de la peur."

La peur tu la ressentira après avoir eu le réflexe. Car la peur telle que nous la concevons n'en est en réalité que le sentiment. Lorsqu'un objet frole ton oeil, des réflexes entrainent des mouvements dans ton organisme. L'information est ensuite traitée par ton système limbique qui te permet de ressentir avec un temps de latence de quelques millièmes de seconde, le sentiment de l'émotion qui vient de te parcourir. Ce n'est que dans un troisième temps que l'intellect décide de stopper le processus de réaction si il s'avère que le danger est passé. Le corps se décontracte, un nouveau sentiment nous informe qu'au niveau émotionnel nos rythmes s'apaisent et notre intellect peut passer à autre chose.

Pour la mouche ok, n'appelons donc pas ça colère mais proto-colère alors. N'empêche que la fonction et la manifestation de ces deux formes de défense naturelle d'un organisme, sont exactement de même nature et que nous partageons avec la mouche un certain héritage animique.
Ase
   Posté le 26-01-2009 ŕ 20:57:59   

"Neuroscientifique de renom, ses travaux portent sur l'étude des bases neuronales de la cognition et du comportement"

---> Damasio est surtout connu pour son refus des modèles computationnels radicaux de l'esprit humain et pour son insistance sur l'importance de l'appropriation du corps, du schéma corporel qui rend possible l'apparition des "marqueurs somatiques" des émotions.
Sa thèse est que même dans nos raisonnements apparemment "froids" ou "abstraits", il y a une composante émotionnelle subtile et discrète en arrière-plan et pour lui, nous ne pouvons prendre nos décisions sans faire intervenir des motivations qui sont le fruit d'une évaluation émotionnelle.



"La peur tu la ressentira après avoir eu le réflexe"

---> le système limbique apparaît avec mammifères, insectivores et (peut-être) avec les premiers oiseaux sociaux pas avant.




"Pour la mouche ok, n'appelons donc pas ça colère mais proto-colère alors"

---> il y a des indices comportementaux et physiologiques de penser que les mouches n'exprime aucune douleur, ni aucune émotion comme l'absence de connotation négative ou positive explicite des signaux nociceptifs dans leurs corps.




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"Il y a tout un continuum entre les instincts et les émotions"

---> oui il fait un peu parfois cette confusion, comme Denton au début de ses travaux sur les "émotions primordiales" mais il a évolué dans sa pensée, et il reconnaît une différence entre les mouvements instinctifs des animaux primitifs, les émotions basiques des oiseaux et mammifères inférieurs, les émotions complexes des mammifères supérieurs, et les sentiments des êtres humains.


Edité le 26-01-2009 à 21:07:46 par Ase


Atil
   Posté le 26-01-2009 ŕ 21:33:07   

"La peur tu la ressentira après avoir eu le réflexe."

>>>>>>>Pas du tout.
Parfois je ferme l'oeil au moindre mouvement qui le frole. Et ensuite je trouve ca idiot car il n'y avait pas de danger. A aucun moment je ne ressens alors de peur pour mon oeil : il s'est fermé par pur automatisme, sans sensation consciente.



"Car la peur telle que nous la concevons n'en est en réalité que le sentiment. Lorsqu'un objet frole ton oeil, des réflexes entrainent des mouvements dans ton organisme. L'information est ensuite traitée par ton système limbique qui te permet de ressentir avec un temps de latence de quelques millièmes de seconde, le sentiment de l'émotion qui vient de te parcourir."

>>>>>>>Le limbique n'intervient pas puisque je ne ressent aucune émotion. L'information entraine directement le mouvement sans passer par le système limbique.
Je ne m'y connais pas trop mais il me semble que ce type de réflexe n'a même pas besoin de passer par le cerveau : le passage du nerf sensoriel au nerf moteur se fait directement dans la colonne vertébrale.