LE FORUM DES CERCLOSOPHES
LE FORUM DES CERCLOSOPHES
 
Retour au forum
 

Ajouter une réponse

Pseudo :    S'inscrire ?
Mot de passe :    Mot de passe perdu ?
Icône :
                                
                                
Message :
 
 
 
Smilies personnalisés
 
Options :
Notification par email en cas de réponse
Désactiver les smilies
Activer votre signature
 
 
Dernières réponses
Atil
En dessous de cet article que j'ai recopié sur le Net, il était écrit " Publié en août 2001. "
PizzaMan
Heu... Cette découverte c'est récent ?
Atil
On ne saura jamais qui a écrit ce texte, mais sans doute son intention était-elle de donner à la postérité une autre image de Socrate, une image moins négative, moins falsifiée et en ce sens beaucoup plus proche de ce qu’il était et de ce qu’il a toujours chéri le plus au monde : la vérité. En ce sens, on peut penser que Diogène est l’auteur de ce papyrus. Une preuve supplémentaire : le papyrus a été retrouvé dans un tonneau enfoui près de l’ancienne agora.
Atil
Voilà le monologue de Diogène à la foule :

« Eh, moutons ! Bééé ! Réveillez-vous ! Bééé ! Un homme va mourir ce soir et vous discutez sur les dernières lois à appliquer ! Cet homme, vous le connaissez bien, il arpente vos rues depuis plus de 50 ans ! Oui, je parle de Socrate ! Depuis 50 ans, il n’a eu de cesse de vous inoculer un remède face à vos ambitions, vos passions : ce remède, c’est la vérité !! C’est elle que vous outragez aujourd’hui par votre indifférence et en le jugeant sur des arguments trompeurs ! Oui, vous n’êtes que des moutons : vous vous laissez prendre à la sophistique ! »

Diogène insulte les sophistes Gorgias et Protagoras et crache aux quatre vents, puis reprend :

« Nos sophistes n’ont de cesse d’outrager les honnêtes hommes par leurs rhétoriques mesquines qui font croire que la vérité n’est qu’opinion ! Tout ce qu’ils disent,vous y croyez ! Vous les payez même pour entendre des fadaises ! Ces sophistes, ils se foutent de vous, avec leurs beaux et inutiles discours, ces loups aux dents acérés n’attendent qu’une chose, vous dévorer votre âme ! Et, bien sûr, vous n’y voyez que du feu ! Mais, regardez-vous ! C’est eux qui vous gouvernent depuis des années, c’est eux qui vous conseillent, surtout vous, riches dignitaires, bailleurs de fonds, qui régulièrement paradez en ce lieu ! »

Diogène crache à nouveau, en bavant cette fois sur lui, puis reprend de nouveau :

« Moutons, soyez donc des hommes ! Débarrassez-vous de ces sophistes, de ces idéologues, de leurs foutues chaînes ! Enlevez le voile qui étouffe vos âmes ! N’ayez pas peur d’affirmer votre authentique nature ! »

A partir de ce moment du papyrus, le discours de Diogène semble prendre un tour, qu’on hésite à appeler « moderne » : « Foule, imagine un monde gouverné par en bas, par les profondeurs de Dame Nature ! »

Voyant Platon au loin, Diogène l’interpelle bruyamment :

« Eh Platon ! Viens par ici ! Que mijotes-tu dans ton coin ? Socrate, ton maître, tu te rappelles, va mourir !

Qu’attends-tu pour protester ! »

Platon, sans daigner répondre, s’en va prestement.

« Je reprends, écoutez ma déclamation, elle vaut cent fois plus de drachmes que ceux que vous donnez tous les jours aux sophistes ! Imaginez, oui, que la société n’ait plus à faire la guerre ! à punir un concitoyen pour avoir dit la vérité ! Oui, plus besoin de tromper l’autre, plus besoin d’ambitionner un quelconque pouvoir. Tout serait donné. Tout. Le pied, quoi ! Enfin, nos femmes, nos esclaves, nos étrangers auraient aussi leur place qu’ils méritent dans la cité ! Et celui qui voudrait travailler le pain le pourrait - sans être assigné à cette tâche tout le temps et tout le reste de sa vie ! Plus de place publique où rivaliser de bêtises, où se donner en spectacles ! La politique, la vraie, ne serait pas celle que vous pratiquez : théâtre d’histrions, de médiocres bouffons ! En un mot, je ne vois qu’une seule et unique idée pour le salut de la cité : la fin de l’Etat ! la fin de tout gouvernement ! »

On entend des cris d’horreur dans l’Agora : ce sont d’abord des cris de femmes, puis on voit un législateur tomber de son banc, pris d’une attaque soudaine. Pendant qu’on l’emmène chez le médecin, Diogène ne s’arrête pas - la foule est toujours là de plus en plus inquiète, consternée.

« Imaginez-vous que la démocratie dont vous faites si grand cas n‘est qu’une épave ! Votre gouvernement par le peuple n’est qu’un gouvernement d’apparence ! Et tout autre gouvernement le sera aussi : là est le cycle infernal, la ronde des morts du pouvoir ! Le gouvernement a tissé sa toile partout dans vos maisons, dans vos vies, mais surtout dans vos coeurs ! Vous frémissez à l’idée de quitter vos penates ! Regardez-moi je n’ai pas peur de parler ! La mort, que vous craignez, moi je l’aime. Après Socrate, mon tour viendra, j’en suis sûr ! Mais en attendant, je suis là, je vis et je m’insurge contre ce que vous faites au citoyen le plus remarquable d’Athènes : Socrate ; mon ami, mon seul et unique ami sur cette terre, lui qui m’a appris à regarder la vérité, j’ose dire ma vérité !

« Oedipes ! Ouvrez-les yeux ! Souvenez-vous de la parole d’Anaximandre, elle donnait à la cité, au commencement, la voie à suivre : « Il faut, disait-il, connaître que la discorde est le droit ». Par vos lois, vous avez profané cette parole sacrée : Anaximandre n’a jamais voulu de la discorde de vos discours. Celle de la sophistique : vaine et inutile. Amère aussi. »

Interpellant un mouton dans la foule, Diogène s’écrie :

« Eh, toi ! Oui, toi ! Dis-moi ce que tu comprends à cette parole d’Anaximandre. »

Le mouton interpelé s’enfuit. Tout sauf un schibboleth...

« Anaximandre veut dire que le conflit est légitime, si l’on veut parvenir à ses fins. Mais ces fins doivent être la libération des chaînes que tout pouvoir établit. Pour cela, il faut être d’une certaine façon un étranger; un de ces êtres qui passe et qui repart ; il faut être un homme capable de refuser le confort des habitudes.

« Vous me voyez ici, depuis des années, dans cette cité comme un étranger. Chaque jour qui passe, par mes actes, mes paroles, mon image dégradée, je vous invite à changer. Chaque jour, je vous rends à votre vrai visage de concitoyens sans conscience. Mais vous ne changez pas ! Vous restez fidèle à vous-mêmes, hiératiques !

« Un homme aujourd’hui va mourir et il est le plus sage des hommes, le citoyen que vous ne serez jamais, et s’il va mourir, c’est uniquement à cause de vous, de votre incompréhension tenace, de votre entêtement stupide ! Je préfère donc retourner à ma vie de chien, plutôt que de partager avec vous, avec toute votre civilité, un repas sans place pour l’hôte, sans place pour l’étranger que vous n’accepterez jamais ! »

Personne dans la foule ne fait rien, pendant le départ de Diogène, vers le Pyrée, on entend des bavardages de protestation, mais rien qui ressemble à une étincelle de vérité. Les sophistes restent cois, comme figés pour l’éternité.
Atil
Voici la deuxième partie. Il s’agit du dialogue entre Diogène et Socrate à propos de Platon.


S - Voilà, l’autre jour, j’étais sorti - non sans m’être querellé avec Xanthippe à propos d’Alcibiade, avec lequel, selon elle, l’autre jour à la fête de la moisson, j’avais trop parlé - et puis je découvre Platon en train de discuter avec Thrasymaque à propos du pouvoir. Platon et son interlocuteur me saluent et Platon me demande : « Maître, pensez-vous que l’on puisse être philosophe et gouverner la Cité ? » A cette question, comme à mon habitude, je n’ai pas répondu, me contentant de rappeler à Platon, que la philosophie n’est qu’une opinion droite et que l’on ne doit pas imposer le savoir au peuple.

D - Qu’a t-il répondu ?

S - Il m’a parlé d’une utopie : une cité idéale. Imagine, Diogène, une cité où les philosophes sont rois et où chacun à sa place bien déterminée. Il dit que ce serait sa république, sa république à lui !

D - Pourquoi des philosophes-rois ? Ne suis-je pas comme toi un philosophe et pourtant nous n’avons et ne réclamons aucun siège ! Au contraire, tu arpentes les rues et moi, je siège dans un tonneau. C’est bien un gosse de riche, ça, vous lui donnez ça, il en veut encore plus ! Ton Platon est un ambitieux !

S - Oui, j’en ai bien peur et ça m’a glaçé le sang. Il va bientôt partir...tester sa théorie auprès de Denys de Syracuse, tu sais le tyran, qui se dit amoureux de la vérité et qui n’a de cesse de réduire son peuple à l’esclavage.

D - Il va vite déchanter, c’est un rêveur ! S’il croit que cette bête du pouvoir va le laisser faire. Il n’a jamais eu à faire aux cros acérés d’un loup !

S - C’est ce que je lui ai dit, avec moins de mordant, mais je crois qu’il veut devenir à son tour un maître et possesseur de la cité. Oui, la vérité ne lui suffit plus, il veut le pouvoir !

D - Moi, je dis : ni dieu ni maître !

S - Oui, tu es la preuve vivante que Platon se trompe. Il semble lier les personnes à une soi-disante nécessité de nature : toi, par exemple, qui as de belles mains, tu serais exclu de cette cité. Car les sculpteurs, les poètes, maîtres de l’image, de la représentation, menacent de capturer ce pouvoir. Les autres : artisans, cordonniers, bateleurs, cuisiniers ne pourront avoir d’autres activités que celles assignées par le roi-philosophe, lui qui dirige tout, à cause de l’éminence de son savoir !

Tu te rends compte : au lieu de pousser les gens au savoir universel, ils les logent dans les interstices d’une toile d’araignée. Il réduit l’homme à un rôle d’abeille ou de fourmi. Dans cette perspective, le roi-philosophe est seul juge de la cité, car sans lui tout régime politique tombe de Charybde en Scylla, c’est-à-dire dans la tyrannie ou le désordre. Et puisque l’ordre de l’action suit l’ordre de la pensée, plus rien n’est laissé au hasard. N’est-ce pas, Diogène, la plus effroyable des dictatures, celle qui repose sur l’obéissance à la vérité!

D - Oui, tu as raison : j’aurais pu être dans l’armée ou à l’assemblée des élus. Mais j’ai préféré tout lâché. Je suis resté là. J’aime ce pays, tu comprends. J’y suis né. Je suis un cynique. Je me considère comme un chien errant. Je passe mon temps à insulter ces hommes politiques tout hanarchés de luxe et de vêtements dorés. J’aime errer des heures dans les rues d’Athènes, voir la réaction des gens quand je leur aboie dessus. J’aime me masturber sur la place publique : comme ça me soulage ! Mais surtout ça fait scandale ! Le scandale est aujourd’hui la seule façon de faire agir les gens. Tantôt ils me semblent des loups, tantôt des moutons d’Arcadie.

S - Je te comprends, Diogène, comme moi, mais à ta manière, tu agis. Certes, tu n’es pas ce... oui, comment déjà, ce grec dégénéré - ce barbare comme nous disons nous les Grecs - qui voulait faire parler de lui, en brûlant un de nos temples. Il a d’ailleurs presque réussi, mais je doute que d’ici deux mille ans, on en entende encore parler. Tandis que toi, ce n’est pas pour l’immortalité que tu vis, c’est pour maintenant, c’est pour défendre ce qu’il y a maintenant à défendre. Mais revenons à Platon..

D - Que dit-il encore ?

S - Je sais qu’il projette d’écrire quelque chose. Par hasard, une de ses tablettes, où il a l’habitude de rapporter ses idées, est tombée l’autre jour ; je l’ai ramassée. En dépit des lignes surchargées d’écriture, ce palimpseste m’a fait comprendre qu’il voulait écrire sur moi, ou plutôt me mettre dans ses Dialogues ! Là encore, l’écriture est une des pièces de son projet. Au lieu que les gens viennent le voir, il pourra, par ses tablettes, se faire connaître du monde entier, et dieu sait qui il va pouvoir rallier à sa cause : car derrière ce discours de vérité, n’y a t-il pas l’ambition d’un jeune athénien, intelligent et soucieux de faire entendre parler de lui !

D - Oui, je comprends ton inquiétude : tu te demandes quoi faire !

S. - J’ai peur qu’il me « récupère », qu’il falsifie, déforme, transforme ma parole en discours de sophistes ! Il m’utilise, je l’en crois capable, la vieillesse n’apporte pas que la sagesse, j’en suis sûr : c’est un loup ! Et le pire peut-être : le chef de la meute !

D - Si je puis t’aider, n’hésite pas à me le dire, Socrate ! Pour ma part je suis un chien-berger sans troupeau, j’erre et j’agis par mes invectives, mes crachats, mes exhibitions. Ne crains pas de me faire confiance : si rien ne sort de ma bouche qui n’ait le goût de la pourriture, c’est parce que je ne rencontre sans cesse que des obstacles à une société où il ferait bon vivre. Tu es mon ami, Socrate, aucune de mes paroles ne te blessera jamais, mais gare à celui qui te fait du mal : je lui réserve toute ma bile, toute ma puanteur et tout mon cynisme.Ton ironie légendaire - Socrate, la torpille, c’est bien ton nom ? - fait écho à ma hargne de chien méchant : je t’aiderai quoiqu’il doive se passer.

S - Je t’en remercie Diogène. Je te crois bien plus fidèle à mon enseignement que ne le sera jamais Platon ! Il faut que je retourne « affronter » Xanthippe ; j’ai promis de rentrer tôt, ce soir. Si elle savait que je suis avec un beau jeune homme, elle me ferait encore une scène. Salut Diogène et merci pour tout !

D- Salut, Socrate et continue à te vouer à la vérité. Ne crains plus rien !

S - Non, Diogène ! J’ai beau faire, mais je crains pour cette vie. Oui, je crains pour tout ceux à qui on refuse l’accès à la vérité, et pour le mal que cela en coûte ! Oui, regarde notre jeunesse ! Regarde notre cité ! Elles sont toutes deux malades. La démocratie est souffrante, et mes os sont bien trop vieux et bien trop frêles pour la tenir hors de l’eau.

D - Je sais, Socrate, mais pour soigner cette maladie, il faut parfois appliquer de l’eau bouillante. Ton cynisme a du bon, mais il faut les « choquer », les terroriser.
Atil
Voici la première partie. Il s’agit des retrouvailles entre Diogène et Socrate.

DIOGENE - Eh, Socrate ! viens donc un peu par ici !

SOCRATE - Salut, Diogène !

D - Que viens-tu donc faire ici - à l’écart de ton chemin habituel ?

S - Diogène, c’est à cause de ma femme, Xanthippe . Mes vieux os ne la supportent plus, voilà près de 50 ans que nous sommes passés devant les dieux et qu’elle me pourrit l’existence. Depuis 50 ans, j’arpente les rues pour me soulager et m’adonner à ma cause : la vérité. Toi, tu es jeune ; tu rentres dans ta quinzième année, je crois ; tu es beau, que les dieux te protègent du mariage.

D - Les dieux, le mariage ah,ah, ah, non Socrate, là où je suis - mon tonneau - aucune femme ne veut y entrer, car là il n’y a aucun dieu.

S - C’est aussi à cause de Mélétos qui m’a intenté un procès. Je dois y aller demain. Tu te rends compte, il m’accuse de corrompre la jeunesse et aussi d’impiété ! Mais c’est lui le sophiste ! Ce sont les sophistes, qui illusionnent notre jeunesse en lui donnant à manger des histoires et en la détournant du vrai devoir.

D - Je te plains, Socrate, tu n’as pas mérité ça ! C’est pour cela, que j’ai décampé. Je ne voulais plus voir leurs têtes d’enflures...

S - Mais le pire, Diogène, c’est mon élève Platon, douze ans ton aîné. Lui est voué à devenir un grand amoureux de la vérité. Mais je le sens trop passionné. Lui, un noble, prenant des leçons avec moi, alors que sa famille, une des plus riches d’Athènes, pourrait lui payer les cours d’un Gorgias ou d’un Protagoras, sophistes à la mode. Que fera-t-il de mon enseignement ! L’autre jour, nous avons eu une conversation. et mon sang s’est glacé...

D - Soulage-toi Socrate, n’hésite pas à parler. Tu es le seul pour qui j’ai de l’estime en cette cité, depuis que j’ai décidé de vivre comme un chien, d’aboyer, de manger et de chier comme un chien. Les gens de la cité sont, comme tu dis, trop dans l’apparence, ils ne voient pas leur vraie nature. Ce sont des loups, ils veulent se dévorer.

S - Merci, Diogène. Si tu veux bien, nous irons là-bas, sous le platane, c’est un endroit où j’aime à me retrouver. De plus, nous y serons tranquilles : de là, on peut voir la cité dominer de tout son long.

D - C’est d’accord.
Atil
Chaque jour, l’archéologie fait quelques heureuses découvertes. Voila la traduction d’un papyrus qui semble remonter à l’époque de la Grèce antique, découvert dans les sous-sols de Plaka, à Athènes et sans nom d’auteur. Le texte semble relativement bien conservé : il comporte trois parties distinctes, mais « enchainées ». De plus, quelques graffitis entourent le texte. Le texte - en grec classique - semble avoir la forme des Premiers dialogues platoniciens.
 
Retour au forum
 
 
créer forum