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 Economie politique Keynesienne

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Ase
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   Posté le 25-12-2008 à 23:56:09   Voir le profil de Ase (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à Ase   

Extraits

La fin du laissez-faire (1926)

Il n’est nullement correct de déduire des principes de l’économie politique que l’intérêt personnel dûment éclairé oeuvre toujours en faveur de l’intérêt général. Et il n’est pas vrai non plus que l’intérêt personnel est en général éclairé. (...) L’expérience ne démontre nullement que les individus, une fois réunis en une unité sociale, sont toujours moins clairvoyants que lorsqu’ils agissent isolément. (...)

A mon avis, la taille optimum des cellules sociales assurant l’encadrement et l’organisation des citoyens est intermédiaire entre celle de l’individu et celle de l’Etat moderne. Je suggère donc que le progrès consiste dans le développement et la reconnaissance officielle de collectivités semi-autonomes à l’intérieur de l’Etat. Ces personnes morales auraient pour seul critère d’action dans le domaine de leur compétence le bien public comme elles l’entendent, et elles écarteraient de leurs délibérations tout mobile d’intérêt personnel, encore qu’il reste nécessaire de concéder quelque latitude à l’égoïsme collectif de groupes particuliers, de classes sociales ou de facultés tant que la sphère de l’altruisme de nos semblables n’aura par grandi suffisamment. (...)

Je propose, pourrait-on dire, un retour aux idées médiévales d’entités autonomes distinctes les unes des autres. Mais en Grande-Bretagne, à tout le moins, les corporations représentent une forme de gouvernement qui n’a jamais perdu de son importance et qui possède des affinités avec notre système institutionnel. A partir de ce qui existe déjà, il est facile de donner des exemples d’entités autonomes et distinctes qui ont atteint ou sont près d’atteindre le développement que j’indique : les universités, la Banque d’Angleterre, l’administration du Port de Londres, peut-être même les compagnies de chemin de fer.

Mais d’un plus grand intérêt encore est la propension des sociétés par actions, passé le seuil d’un certain âge et d’une certaine taille, à se rapprocher du statut des offices publics (public corporations) plutôt que de celui des entreprises privées à caractère individualiste. (...) Le cas le plus extrême de cette tendance affectant une institution qui est théoriquement la propriété pleine et entière de personnes privées, est celui de la Banque d’Angleterre. Il est à peu près conforme à la vérité de dire qu’il n’y a pas de groupe de personnes dont le Gouverneur de la Banque d’Angleterre se soucie moins en arrêtant sa politique que le groupe de ses propres actionnaires. Leurs droits, en dehors du dividende d’usage, sont déjà tombés aux alentours de zéro. Mais cela vaut en partie pour d’autres institutions de grande taille. A mesure que le temps passe, elles se socialisent. (...)

C’est ainsi qu’on ne trouverait point de « grande question politique », comme on dit, qui soit aussi dérisoire, aussi peu pertinente pour la réorganisation de la vie économique anglaise que la nationalisation des chemins de fer, par exemple. (…)

Nous devons tirer pleinement avantage des tendances spontanées aux corporations semi-autonomes et non à des organismes du gouvernement central qui seraient placés sous la responsabilité directe de Ministres d’Etat. (…)

Je crois qu’il faut rechercher le remède à tout cela en partie [ce sera son premier exemple, ndlr] dans le contrôle délibéré de la monnaie et du crédit par une institution centrale et en partie dans le rassemblement et la diffusion sur une vaste échelle des informations concernant la situation des affaires. (…) Cela conduirait la société à exercer, par l’intermédiaire d’un organisme d’exécution adéquat, l’activité d’un service de renseignements qui pénétrerait de sa propre initiative les dédales les plus profonds de l’entreprise privée, et néanmoins l’initiative privée et l’esprit d’entreprise n’en seraient pas entravés pour autant.

Mon deuxième exemple se rapporte à l’épargne et au placement. J’estime qu’un acte concerté de jugement intellectuel est nécessaire pour décider des points suivants : sur quelle échelle est-il souhaitable que la communauté dans son ensemble épargne ses revenus ? Sur quelle échelle les épargnes ainsi obtenues devraient-elles être exportées sous la forme de placements à l’étranger ? [ce point est essentiel pour Keynes, et nous verrons plus loin comment ces placements à l’étranger s’inscrivent dans un esprit colonial, ndlr] L’organisation actuelle du marché où opèrent les investisseurs répartit-elle les épargnes de manière à leur faire suivre les circuits qui sont les plus productifs pour la nations ? Je ne pense pas que des questions de ce genre devraient être abandonnées entièrement aux aléas de l’opinion privée et des profits privés comme c’est le cas aujourd’hui.

Mon troisième exemple concerne la population. Le moment est désormais venu où chaque pays doit avoir une politique nationale mûrement réfléchie et déterminant la tailles optimale de sa population, que celle-ci soit supérieure, inférieure ou égale à la population actuelle. Et après avoir arrêté cette politique, il nous faudra prendre les mesures pour la mettre en application. Il se peut qu’arrive un peu plus tard le jour où la communauté dans son ensemble devra se soucier de la qualité innée [souligné par la rédaction] de ses futurs membres aussi bien que de leur nombre.





Le navire du pirate Francis Drake
Perspectives économiques pour nos petits-enfants (1930)

Cet extrait tiré d’un autre texte nous permet de mieux saisir la conception qu’a Keynes de la richesse des nations, qui ne découle pas selon lui des pouvoirs d’innovation de l’esprit humain (et plus particulièrement de l’essor qu’il prit à partir de la renaissance), mais du vol pur et simple des avoirs des autres, et du recours à des artifices comme celui de l’« intérêt composé ».

Les temps modernes s’ouvrirent, me semble-t-il, avec l’accumulation du capital qui commença au XVIè siècle. Des raisons que je suis obligé de passer sous silence dans cet exposé, m’ont conduit à penser que ce phénomène eut pour cause initiale la hausse des prix et l’augmentation consécutive des profits qui résultèrent de l’introduction de ces réserves d’or et d’argent transportées par l’Espagne du Nouveau Monde dans l’Ancien. Depuis cette époque jusqu’à nos jours, la capacité d’accumulation que possède l’intérêt composé et qui, selon toutes apparences, avait été en sommeil pendant de nombreuses générations, se développa avec une force renouvelée après s’être réveillée. Or, la capacité d’accumulation de l’intérêt composé sur une période de deux cents ans est telle que l’imagination est saisie de stupeur.

Qu’il me soit permis d’illustrer ce point par une somme que j’ai calculée. La valeur actuelle des investissements britanniques à l’étranger est estimée à 4 milliards de livres environ. Ces investissements nous procurent un revenu au taux d’intérêts de 6,5 % environ. Nous rapatrions la moitié de ce revenu et en avons la jouissance ; quant à l’autre moitié, soit 3,25 %, nous la faisons s’accumuler à l’étranger par le jeu de l’intérêt composé. Or, voilà 250 ans à peu près qu’un processus de ce genre est en cours.

Je fais remonter en effet les origines des investissements britanniques à l’étranger au trésor que Drake enleva en 1580 à l’Espagne. Cette année-là, il regagna l’Angleterre en rapportant le fabuleux butin du Golden Hind. La reine Elizabeth était un important actionnaire au sein du syndicat qui avait financé cette expédition. Au moyen de sa part du butin elle remboursa la totalité de la dette extérieure de l’Angleterre, équilibra son budget et se trouva disposer encore d’un reliquat de 40 000 livres. Elle plaça cette somme dans la Compagnie du Levant, laquelle devait prospérer. Grâce aux bénéfices procurés par la Compagnie du Levant on fonda la Compagnie des Indes Orientales, et ce sont les bénéfices réalisés par cette vaste entreprise qui servirent de base à tous les investissements que l’Angleterre allait effectuer à l’étranger par la suite. Or il se trouve que l’accroissement de ce capital de 40 000 livres au taux de 3,25 % à intérêt composé équivaut approximativement au montant réel des investissements britanniques à l’étranger à différentes dates, et aujourd’hui serait effectivement égal à cette somme de 4 milliards de livres que j’ai déjà citée comme étant le total actuel de nos investissements à l’étranger. Ainsi donc, chaque livre sterling rapportée en Angleterre par Drake en 1580 est maintenant devenue 100 000 livres. Tel est le pouvoir de l’intérêt composé !


Est-ce la fin du système économique actuel ?
Peut-on/Doit-on faire une relance keynésienne ?



Plus d'infos complémentaires :

http://www.democratie-socialisme.org/spip.php?article137

http://www.local.attac.org/18/educpop/eco2.pdf

http://fr.wikipedia.org/wiki/Nouvelle_%C3%A9conomie_keyn%C3%A9sienne

http://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9orie_g%C3%A9n%C3%A9rale_de_l%27emploi,_de_l%27int%C3%A9r%C3%AAt_et_de_la_monnaie

http://fr.wikipedia.org/wiki/Keynesianisme
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